Une cirrhose, qu’est-ce que c’est ?
La cirrhose du foie, qu’on appelle généralement cirrhose, est une maladie du foie. C’est une maladie qui dure dans le temps. La cirrhose est donc une maladie chronique.
Une cirrhose peut être compensée ou décompensée :
On parle de cirrhose compensée quand le foie fonctionne encore bien et qu’il n’y a pas de complications.
On parle de cirrhose décompensée quand le foie ne fonctionne plus bien et qu’il y a des complications (voir Quelles sont les conséquences d’une cirrhose ?).
Comment se développe une cirrhose ?
Lorsque le foie est tout le temps agressé sur une longue période, il peut s’abimer et cicatriser (se fibroser). La fibrose, c’est la marque de la cicatrisation du foie.
La cirrhose est le dernier stade de la fibrose du foie.
Le développement d’une cirrhose du foie prend plusieurs années.
Pour 100 personnes qui ont une accumulation de graisse dans le foie (stéatose) qui n’est pas causée par l’alcool, 5 à 10 développent une cirrhose.
Pour 100 personnes qui ont une maladie du foie causée par l’alcool, 50 développent une cirrhose. Donc, 1 personne sur 2.
Quels sont les facteurs de risque et les causes de cirrhose ?
Les facteurs de risque de cirrhose sont des comportements ou des problèmes de santé qui peuvent entraîner une maladie du foie. Ces maladies du foie peuvent ensuite causer une fibrose du foie puis une cirrhose.
Tout ce qui attaque le foie de façon régulière pendant plusieurs années (10 à 20 ans) peut causer une cirrhose.
Les principaux comportements ou habitudes de vie qui peuvent causer une cirrhose sont :
Les principaux problèmes de santé qui peuvent causer une cirrhose sont :
Certains médicaments, comme l’amiodarone et le méthotrexate, peuvent causer une cirrhose du foie.
Il existe encore d’autres causes de cirrhose. Elles sont moins fréquentes. Par exemple :
L’alcool
Une consommation importante et prolongée d’alcool attaque le foie et peut causer ce qu’on appelle une maladie du foie liée à l’alcool.
Les virus des hépatites B et C
Le virus de l’hépatite B et le virus de l’hépatite C sont appelés comme cela car ils attaquent le foie et entraine une inflammation du foie. Une hépatite est une inflammation du foie. Ces virus attaquent le foie pendant plusieurs années. Ils entrainent donc une hépatite chronique et de la fibrose. Une hépatite virale chronique B ou C peut donc être une cause de cirrhose.
L’obésité, le syndrome métabolique et le diabète de type 2
L’obésité, le syndrome métabolique et le diabète de type 2 peuvent entraîner une accumulation de graisses dans le foie. La stéatose est une accumulation de graisses dans le foie. On parle alors de maladie stéatosique du foie. Quand un organe ne fonctionne plus bien, on parle de dysfonction. Ici, c’est le foie qui ne fonctionne plus bien, cette maladie s’appelle la maladie stéatosique du foie liée à une dysfonction métabolique. Avant, on parlait de stéatose hépatique non-alcoolique.
Une maladie stéatosique du foie
La stéatose est une accumulation de graisses dans le foie. Elle peut être causée par :
Quelles sont les conséquences d'une cirrhose ?
Pour comprendre les conséquences d’une cirrhose, il est plus facile de d’abord comprendre le fonctionnement du foie.
Fonctionnement du foie
Pour que notre corps fonctionne, le foie fait beaucoup de choses (fonction hépatique). Par exemple :
Le foie participe à la digestion et au métabolisme :
Il stocke le sucre.
Il fabrique des protéines.
Il fabrique des graisses et produit la bile pour digérer des graisses.
Il stocke des vitamines et participe à la fabrication de la vitamine D.
Le foie fabrique des substances qui permettent au sang de coaguler ou d’être plus fluide.
Le foie transforme (dégrade) et élimine des substances dangereuses pour le corps, comme les médicaments, l’alcool, ou des toxines, comme l’ammoniac.
Le foie reçoit du sang d’une grosse veine, la veine porte. Cette veine lui amène notamment les éléments nutritifs (nutriments) qui viennent du tube digestif.
Conséquences d’une cirrhose
Les conséquences les plus fréquentes d’une cirrhose sont les suivantes :
Le foie fonctionne moins bien (diminution de la fonction hépatique), donc :
La digestion est moins bonne, c’est-à-dire que le corps profite moins des aliments :
Le sang ne coagule plus bien :
Le sang coagule trop facilement dans les veines :
Le foie oppose une résistance au passage du sang à travers le foie. Cela augmente la pression dans la veine porte (hypertension portale) et entraine :
Le cancer du foie (hépatocarcinome).
Il existe d’autres conséquences, moins fréquentes, par exemple :
Le foie élimine moins bien l’ammoniac, une toxine. Dès lors, l’ammoniac arrive au cerveau, ce qui peut provoquer, par exemple, une diminution de la conscience, de la confusion, des problèmes de mémoire ou de l’agitation. Cela peut aller jusqu’au coma. On parle d’encéphalopathie hépatique. En effet, une encéphalopathie est une maladie du cerveau. Ici, elle est liée au mauvais fonctionnement du foie.
Une diminution rapide du fonctionnement des reins (insuffisance rénale aiguë).
Il n’est pas possible de reconnaître une cirrhose sur base des signes (symptômes). Il faut des examens complémentaires (voir Comment est posé le diagnostic de cirrhose ?).
La plupart des personnes n’ont pas de signe (pas de symptôme) pendant plusieurs années. Mais la maladie progresse. Du coup, chez presque 1 personne sur 2, on pose le diagnostic de cirrhose quand la maladie progresse et que les complications apparaissent.
Certaines personnes ont des symptômes, par exemple :
de la fatigue ;
se sentir faible ;
une perte d’appétit ;
une perte de poids et une fonte des muscles ;
la peau qui chatouille (démangeaisons) ;
des infections fréquentes ;
une baisse de la libido ;
des petits vaisseaux sanguins dilatés sur la peau du visage (télangiectasie) ;
des petits vaisseaux sanguins en forme d'araignée sur la peau ;
des ongles blancs ;
les paumes des mains rouges ;
un gonflement des seins chez les hommes (gynécomastie) ;
une diminution du volume des seins chez les femmes ;
des veines gonflées sur le ventre ;
une perte des poils.
Lorsque la cirrhose est décompensée (voir Une cirrhose, qu’est-ce que c’est ?), les signes de complications peuvent être :
un gonflement du ventre à cause de l’ascite ;
une diminution de la conscience, une confusion, des problèmes de mémoire, une agitation :
des vomissements de sang (hématémèse) ou des selles noires (méléna) à cause des varices œsophagiennes qui saignent ;
un gonflement des jambes ;
une coloration jaune du blanc de l’œil et de la peau (jaunisse).
ou une encéphalopathie (voir Conséquences d’une cirrhose).
Pour poser le diagnostic, votre médecin vous pose des questions. Il ou elle peut aussi proposer de vous examiner et de faire des examens complémentaires.
Votre médecin pose des questions
Votre médecin vous pose des questions :
pour connaître vos symptômes ;
pour savoir si vous êtes à risque d’avoir une maladie qui peut causer une cirrhose. Ainsi, il ou elle peut vous poser des questions sur :
votre consommation d’alcool,
votre sexualité,
les médicaments que vous avez pris avant,
les compléments alimentaires que vous prenez ;
pour connaître les éventuels problèmes de santé dans votre famille, par exemple un diabète.
Votre médecin propose de vous examiner
Votre médecin peut examiner l’ensemble de votre corps, par exemple :
Votre médecin propose des examens complémentaires
Votre médecin demande d’abord une prise de sang, par exemple pour voir comment fonctionne le foie ou pour chercher si vous avez une hépatite virale.
Sur base de vos symptômes et des résultats de la prise de sang, votre médecin peut demander d’autres examens :
une gastroscopie, c’est-à-dire passer une petite caméra par la bouche, alors que vous êtes un peu endormi·e, pour chercher des varices dans l’œsophage ;
une échographie du ventre (échographie de l’abdomen) pour observer le foie, la rate, la veine porte et chercher s’il y a de l’ascite ;
une biopsie du foie, c’est-à-dire prendre un petit morceau du foie avec une aiguille, sous anesthésie locale, pour pouvoir l’observer au microscope ;
une élastographie, c’est-à-dire une sorte d’échographie qui permet de mesurer la souplesse du foie et la fibrose ;
un scanner (CT-scan) ou une imagerie par résonance magnétique (IRM ou RMN) du ventre pour observer le foie, la rate, la veine porte et chercher s’il y a de l’ascite, par exemple.
Que pouvez-vous faire ?
Si vous avez une maladie chronique du foie, suivez bien votre traitement et restez en contact avec votre médecin pour chercher et trouver (dépister) une éventuelle cirrhose au plus tôt.
Si vous avez une cirrhose, il est possible de freiner l’évolution de la cirrhose et de diminuer le risque d’avoir des complications. La plupart des personnes atteintes d'une cirrhose débutante et qui parviennent à contrôler la progression et à ralentir les lésions du foie vivent de nombreuses années.
Comme votre foie est déjà agressé par une maladie, essayez d’éviter les facteurs de risque de développer une cirrhose ou une autre maladie du foie :
Diminuez ou arrêtez de boire de l’alcool, même si votre problème au foie n’est pas causé par l’alcool :
En cas de cirrhose, il est indispensable d’arrêter complètement l’alcool.
Demandez conseil à votre médecin ou consultez un centre spécialisé dans les problèmes d’alcool pour vous aider à diminuer ou à stopper l’alcool.
Mangez de manière saine et équilibrée. Suivez les conseils de votre diététicien·ne ou nutritionniste, par exemple :
Mangez suffisamment, certainement si vos muscles ont fondu et que votre poids a diminué.
Mangez suffisamment de protéines car vous avez besoin de plus de protéines que les personnes qui n’ont pas de cirrhose.
Faites régulièrement des petits repas et mangez un petit peu avant de vous coucher le soir.
Limitez votre consommation de sel, n’ajoutez pas de sel dans vos aliments lorsque vous êtes à table.
Faites régulièrement de l’activité physique, si possible tous les jours :
Si vous avez besoin d’un médicament, par exemple contre la douleur, demandez conseil à votre médecin ou à votre pharmacien·ne :
Ne prenez pas d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS), comme l’ibuprofène ou le naproxène.
Ne prenez pas trop de paracétamol :
Le paracétamol peut être toxique pour le foie.
Vous ne pouvez pas en prendre autant que les personnes qui n’ont pas de cirrhose.
Généralement, vous ne pouvez pas dépasser 2 à 3 grammes par jour (2 à 3 g/j).
Si vous avez un excès de poids (surcharge pondérale ou obésité), essayez de perdre du poids.
Si vous avez un syndrome métabolique ou un diabète de type 2, suivez bien votre traitement et les conseils alimentaires.
Si vous avez des démangeaisons de la peau :
Protégez vos rapports sexuels avec un préservatif pour éviter d’être contaminé·e par le virus de l’hépatite B.
Si vous consommez des drogues illégales, parlez-en avec votre médecin afin qu’il puisse vous conseiller et vous aider à réduire ou à stopper votre consommation. Si vous n’arrivez pas à stopper votre consommation, utilisez du matériel stérile pour l’injection ou le sniff pour ne pas être contaminé·e par le virus de l’hépatite B ou C.
Que peuvent faire les professionnel·les de la santé ?
Il est possible de freiner l’évolution de la cirrhose et de diminuer le risque d’avoir des complications. La cirrhose et la fibrose peuvent même diminuer si on traite la cause de la cirrhose.
Pour cela, votre médecin généraliste et votre médecin spécialiste vous accompagnent dans vos efforts personnels (voir Que pouvez-vous faire ?) et vous proposent un suivi, des conseils, des traitements.
Suivi régulier
Vos médecins vous proposent de vous voir régulièrement pour observer l’éventuelle évolution de la cirrhose et détecter les éventuelles complications de la cirrhose. Cela se fait par :
Conseils
Vos médecins vous proposent des conseils :
pour une alimentation équilibrée, adaptée à votre situation et, si nécessaire, pour perdre du poids (voir Que pouvez-vous faire ?) ;
pour une activité physique régulière (voir Que pouvez-vous faire ?) ;
pour ne pas boire d’alcool :
pour réduire votre risque d’être infecté·e par le virus de l’hépatite A, B ou C :
En effet, il faut éviter au maximum que votre foie soit abimé par ces virus.
Votre médecin vous donne donc des conseils si :
vous voyagez dans certains pays,
vous consommez des drogues illégales par injection ou sniff,
vous avez des rapports sexuels ;
en ce qui concerne l’utilisation de certains médicaments, comme :
le paracétamol : en cas de cirrhose, en général, il ne faut pas dépasser 2 à 3 grammes par jour. Votre situation est peut-être différente, respectez la dose maximale recommandée par votre médecin.
les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS), comme l’ibuprofène ou le naproxène : en cas de cirrhose, vous ne pouvez pas prendre d’AINS.
en matière de vaccination contre l’hépatite A, B, la grippe ou le pneumocoque.
Un ou une diététicien·ne ou nutritionniste peut vous conseiller et vous accompagner pour les changements alimentaires en lien avec la cirrhose, les conséquences de la cirrhose, le syndrome métabolique, le diabète ou le poids.
Il existe des associations qui peuvent vous aider à diminuer et arrêter votre consommation d’alcool (voir Vous cherchez une aide spécialisée ?)
Traitements des causes, des symptômes et des conséquences de la cirrhose
En fonction de votre situation personnelle, vos médecins peuvent vous proposer :
un traitement du problème qui a causé la cirrhose, par exemple un traitement de l’hépatite virale chronique B ou C ou de la maladie stéatosique du foie liée à une dysfonction métabolique ;
des soins et des médicaments pour soulager les symptômes liés à la cirrhose, par exemple en cas de douleur, de démangeaisons (prurit), d’anxiété ou de dépression ;
en cas d’hypertension portale : un médicament pour faire baisser la tension (anti-hypertenseur) ;
un traitement des éventuelles complications, par exemple :
si vous avez de l’ascite :
des conseils pour limiter votre consommation de sel,
un médicament diurétique pour éliminer l’ascite par les urines,
quand il y a beaucoup d’ascite et que le traitement par médicament ne suffit pas ou qu’il cause trop d’effets indésirables : une ponction du liquide dans le ventre à l’aide d’une aiguille, une opération (TIPS, voir ci-dessous) ou la pose d’un drain pour éliminer de l’ascite régulièrement ;
si vous avez des varices œsophagiennes, il existe 2 choix de traitement. Discutez avec vos médecins du meilleur choix pour vous :
si vous avez une encéphalopathie porto-systémique : un laxatif qui diminue la production d’ammoniac dans l’intestin. Dès lors, au départ de l’intestin, moins d’ammoniac est absorbé vers le sang et moins d’ammoniac arrive au cerveau.
une opération pour diminuer la pression dans la veine porte. Il s’agit de mettre un petit tube entre la veine qui entre dans le foie (la veine porte) et la veine qui sort du foie (la veine cave inférieure) pour que le sang passe plus facilement à travers le foie et donc que la pression diminue dans la veine porte. C’est une sorte de dérivation (shunt en anglais). Pour amener le petit tube au foie, on passe par une grosse veine du cou, la veine jugulaire. On parle de TIPS pour, en anglais, Transjugular Intrahepatic Port-systemic shunt. Le TIPS peut permettre de diminuer les complications de la cirrhose, par exemple l’ascite.
Greffe du foie
Le seul moyen de pouvoir guérir d’une cirrhose, c’est la greffe du foie. Il s’agit donc de retirer le foie de la personne malade et de le remplacer par le foie sain d’une autre personne.
C’est une opération qui est proposée chez les personnes qui ont une cirrhose très décompensée (stade final de la cirrhose) ou qui ont développé un cancer du foie.
Il est possible que votre médecin vous parle d’une greffe alors que vous n’êtes pas au stade final. Il est en effet plus prudent de préparer les choses bien à l’avance au cas où la situation se dégradait.