La douleur
Pourquoi avons-nous mal ?
Dans la plupart des cas, surtout quand la douleur est récente (aiguë), la douleur nous rend service. En effet, le système nerveux est comme un système d’alarme. Il nous avertit d’un danger possible et nous aide à nous protéger.
Douleur aiguë, douleur persistante, quelles différences ?
Douleur aiguë
Lorsqu’une douleur dure depuis moins de 6 semaines, on parle d’une douleur aiguë. Cette douleur récente (aiguë) est généralement liée à une blessure (lésion), par exemple une brûlure.
Douleur persistante (chronique)
Une douleur persistante, appelée aussi douleur chronique, est une douleur qui dure depuis plus de 3 mois.
Très souvent, cette douleur n’est pas ou n’est plus causée par une lésion du corps. C’est le système nerveux qui est devenu hypersensible. Le système d’alarme est perturbé.
Que se passe-t-il en cas de douleur persistante ?
Plusieurs mécanismes peuvent expliquer une douleur persistante. En fonction du mécanisme, on parle de douleur nociplastique, de douleur neuropathique ou de douleur nociceptive.
- Le plus souvent, il n’y a pas ou il n’y a plus de lésion. C’est le système nerveux qui est devenu hypersensible. On parle de douleur nociplastique. Une douleur persistante est fréquemment liée à ce mécanisme d’hypersensibilisation du système nerveux ;
- Si la douleur est liée à une lésion ou une maladie du système nerveux, on parle de douleur neuropathique ;
- Si la douleur est liée à une lésion ou une inflammation ailleurs qu’au niveau du système nerveux, on parle de douleur nociceptive.
Souvent, plusieurs mécanismes expliquent la douleur. Ainsi, même s’il existe une lésion, le système nerveux est aussi devenu hypersensible. Et c’est très souvent cette hypersensibilité, plus que la lésion, qui est à l’origine de la douleur.
Un système nerveux hypersensible
Le système nerveux est devenu hypersensible. La douleur n’a pas pour but d’avertir et de protéger le corps.
- Vous continuez à ressentir de la douleur même si la lésion est guérie ;
- La douleur n'est pas proportionnelle à la lésion : ce que vous ressentez est exagéré par rapport à la lésion.
Votre douleur est bien réelle, ce n’est pas ‘dans votre tête’. Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de lésion qu’il n’y a pas d’explication à votre douleur.
Le fonctionnement du système nerveux est modifié par :
- vos activités physiques ;
- votre sommeil ;
- le stress et les émotions (tristesse, angoisse,… ) ;
- votre situation sociale ;
- l’attention que vous portez à la douleur, ou, au contraire, le fait d’être occupé à autre chose, surtout si cette activité vous rend heureux ou est importante pour vous ;
- votre compréhension de la douleur. C’est pour cela qu’un thérapeute qui a l’habitude de s'occuper de personnes qui souffrent d’une douleur persistante peut vous expliquer les mécanismes de la douleur.
La douleur que vous ressentez peut avoir des conséquences sur :
- votre bien-être ;
- vos relations avec votre famille, vos amis ;
- votre travail ;
- votre humeur ;
- votre sommeil.
Un cercle vicieux peut donc s’installer…
La bonne nouvelle, c’est que votre système nerveux peut aussi s’adapter dans l’autre sens. Vous pouvez agir sur votre douleur en agissant sur votre mode de vie : activités physiques, activités qui vous font du bien, sommeil, …
Y-a-t-il beaucoup de personnes qui souffrent d’une douleur persistante ?
Les personnes qui souffrent de douleurs persistantes ne consultent pas toutes un professionnel de la santé. Il est donc difficile de connaître avec précision le nombre de personnes qui souffrent d’une douleur persistante.
On pense que 18 adultes sur 100 souffrent d'une douleur persistante modérée à sévère. Il s’agit donc d’un problème de santé important.
Comment reconnaître une douleur persistante (chronique) ?
Votre douleur dure depuis plus de 3 mois ?
Alors, vous souffrez d'une douleur persistante.
Votre douleur est-elle liée à une hypersensibilité de votre système nerveux ?
C’est probablement le cas si :
- votre douleur est présente depuis longtemps, car il y a de fortes chances que votre corps ait eu le temps de guérir ;
- votre douleur change de place et a tendance à s’étendre ;
- l’intensité de votre douleur change sans explication. Parfois sur la même journée ou sur une heure, une douleur légère devient forte, ou l’inverse ;
- des stimulations qui ne sont normalement pas douloureuses, comme un léger contact avec la peau, provoquent de la douleur ;
- votre douleur apparaît, sans lésion, sans activité.
Comment une douleur persistante est-elle évaluée ?
Dans la majorité des cas, une approche globale est nécessaire pour évaluer une douleur persistante. Votre médecin collaborera donc souvent avec d’autres professionnels.
Votre médecin cherchera la cause de votre douleur :
- votre système nerveux est-il devenu hypersensible ?
- existe-t-il une autre cause possible à votre douleur ?
Il réfléchira avec vous à ce qui influence votre douleur.
Il évaluera l’impact de la douleur sur votre vie.
En fonction de cette discussion, votre médecin peut vous proposer :
- de consulter un autre professionnel pour une évaluation plus spécifique, par exemple un kinésithérapeute, un psychologue ou un spécialiste de la douleur, un spécialiste en réadaptation ;
- un examen complémentaire, par exemple :
- un examen d’imagerie médicale (radio, scanner, …),
- un examen du fonctionnement du système nerveux,
- une analyse de sang,
L’ensemble de cette évaluation permettra de déterminer le meilleur traitement pour vous.
Que pouvez-vous faire ?
Une douleur persistante (chronique) peut vous empêcher de réaliser vos activités. Si vous arrêtez vos activités, cela peut avoir des conséquences sur votre condition physique, sur l’image que vous avez de vous-même et sur votre vie sociale. Arrêter vos activités peut aussi contribuer à la persistance et l’augmentation de vos douleurs.
Bouger est important
Bougez autant que possible, ni trop, ni trop peu :
- augmentez vos activités de façon progressive ;
- testez et respecter vos limites ;
- alternez les périodes d’activité et les périodes de repos.
Vous trouvez que c’est difficile ? Un kinésithérapeute qui connaît bien les patients souffrant de douleurs persistantes peut vous aider. Demandez éventuellement conseil à votre médecin généraliste.
Un mode de vie sain est aussi important
- dormez suffisamment ;
- vous souffrez de stress ? Parlez-en avec une personne digne de confiance, cherchez les moyens qui pourraient vous aider ;
- mangez sainement et surveillez votre poids ;
- vous fumez ? Le tabagisme peut avoir un impact négatif sur votre douleur. Il existe des aides pour arrêter de fumer.
Prenez du bon temps en pratiquant des activités physiques et des loisirs qui vous font du bien.
Essayez de continuer à travailler, éventuellement à temps partiel. Vous pouvez en parler avec votre médecin généraliste ou votre médecin du travail.
Si vous avez besoin d’un médicament, parlez-en à votre médecin.
Que peut faire votre médecin ?
Avec vous, votre médecin réfléchit à un plan de traitement. Il discute avec les professionnels que vous avez éventuellement rencontrés (kinésithérapeute, psychologue, spécialiste de la réadaptation, …).
Ce plan de traitement tient compte :
- de vos besoins, en fonction, par exemple, d’autres maladies comme une dépression, de l’anxiété, un diabète,… ;
- de votre mode de vie ;
- de comment vous vivez la douleur ;
- de vos attentes ;
- des objectifs possibles pour vous.
Dans la majorité des cas, il s’agit d’une prise en charge multimodale.
Prise en charge multimodale
Se rétablir d’une douleur persistante peut prendre du temps et nécessite très souvent une prise en charge multimodale. Cela signifie que le plan de traitement comprend différents moyens d’actions (modes d’actions).
Il peut s’agir :
- d’information sur la douleur et sur ce qui peut l’influencer,
- d’activités et d’exercices adaptés à votre situation,
- de conseils sur le sommeil,
- d’activités qui vous font du bien,
- d’exercices pour vous détendre et relâcher vos muscles,
- de techniques pour vous aider à gérer votre stress,
- d’un accompagnement psychologique,
- de médicaments qui pourraient vous aider.
Cela dépend de votre situation.
Médicaments
Un médicament est peut-être utile dans votre cas. Votre médecin vous proposera alors un médicament en fonction de votre situation personnelle. Cela peut être un des antidouleurs ci-dessous.
Antidouleurs classiques
- Paracétamol
- c’est souvent le premier choix ;
- Anti-inflammatoire (ibuprofène ou naproxène par exemple)
- à la place ou en plus du paracétamol dans certaines situations ;
Attention, des effets secondaires graves sur l'estomac, les reins et le cœur sont possible surtout si vous êtes plus âgé. Donc,
- la dose efficace la plus faible possible ;
- le moins longtemps possible.
Antidouleurs spécifiques qui agissent sur le système nerveux, par exemple :
- Médicament utilisé d’habitude pour traiter l'épilepsie (anti-épileptique) (par exemple, la gabapentine ou la prégabaline) ;
- Antidépresseur (par exemple, l'amitryptiline ou la duloxétine).
Les antidouleurs opioïdes (par exemple la codéine ou le tramadol) ne sont presque jamais recommandés en cas de douleur persistante.
Demandez toujours conseil à votre médecin.
Programme spécifique de gestion de la douleur
Si les moyens proposés ci-dessus (activités physiques, sommeil, …) ne vous aident pas suffisamment, l'avis d'un spécialiste peut être utile, par exemple en médecine physique ou dans une clinique de la douleur.
Que pouvez-vous faire avec votre kinésithérapeute ?
Si vous souffrez de douleurs persistantes, nous vous conseillons de vous faire accompagner par un kinésithérapeute (si nécessaire, spécialisé dans les douleurs chroniques).
Éducation à la douleur
Votre kinésithérapeute peut vous donner des informations sur :
- ce qui peut expliquer votre douleur ;
- les facteurs qui favorisent votre rétablissement ;
- l'importance de faire de l'exercice et d’un mode de vie sain.
Soutien et accompagnement
Votre kinésithérapeute vous soutient et vous motive à bouger autant que possible, ni trop, ni trop peu, en tenant compte de vos possibilités et de votre douleur.
Ensemble, vous verrez :
- comment faire des activités et des exercices physiques qui sont adaptés pour vous ;
- comment gérer les craintes qui vous empêchent de faire de l’exercice ;
- quels exercices et quelles techniques sont les mieux adaptés à votre situation :
- exercices de relaxation,
- techniques pour gérer le stress,
- gestion des activités.
Ensemble, vous déciderez d’un programme d’exercices adapté à votre situation.
Thérapie manuelle – Techniques manuelles
Dans certaines situations, en plus de l’éducation à la douleur, du soutien et de l’accompagnement (voir ci-dessus), votre kinésithérapeute peut utiliser temporairement des techniques manuelles. Il peut mobiliser (mobilisations passives) ou manipuler (manipulations) certaines parties de votre corps.
En savoir plus ?
Comprendre et agir
- Douleur généralisée, neuropathie, douleur pelvienne, maux de tête ; douleur au dos, au cou et aux articulations – Association Québécoise de la Douleur Chronique
- Comprendre la douleur et qu'en faire en moins de 5 minutes (vidéo) – GP Access et Hunter Integrated Pain Service
- Douleurs chroniques – Qu’est-ce que c’est, idées reçues, comment s’en débarrasser (infographies) – World Physiotherapy
- Mieux vivre avec la douleur – Cor-Kinetic
- La douleur et moi (vidéo) – Royal Holloway University of London
- Gestion de la douleur chronique – Association Québécoise de la Douleur Chronique
- Prendre le dessus sur les douleurs chroniques – World Physiotherapy
Bouger
- La pyramide alimentaire – Manger Bouger – Question Santé
- Activité physique – Manger Bouger – Question Santé
- Bouger à tout âge… Après 50 ans aussi ! – Manger Bouger – Question Santé
Médicaments
- Paracétamol – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Anti-inflammatoires non-stéroïdiens – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Ibuprofène – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Naproxène – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Amitriptyline – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Duloxétine – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Gabapentine – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
- Prégabaline – CBIP – Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique
Vous cherchez une aide plus spécialisée ?
- Services de Santé Mentale – Le guide social
- Trouver un psychologue – Commission des psychologues
- Trouver un diététicien agréé – Union professionnelle des diététiciens de langue française
- Centre d’Aide aux Fumeurs (CAF®) – FARES – Fonds des Affections Respiratoires
- Tabacologues – FARES – Fonds des Affections Respiratoires
Sources
Sources principales
- Guide de pratique clinique belge ‘Prise en charge de la douleur chronique en première ligne de soins’ (29.06.2017) – ebpracticenet
- Nijs, J. G., SZ; Clauw, DJ; Fernández-de-las-Peñas, C; Kosek, E; Ickmans, K; Fernández Carnero, J; Polli, A; Kapreli, E; Huysmans, E; Cuesta-Vargas, AI; Mani, R; Lundberg, M; Leysen, L; Rice, D; Sterling, M; Curatolo, M. (2021). "Central sensitisation in chronic pain conditions: Latest discoveries and their potential for precision medicine." The Lancet Rheumatology 3: e383-392.
- Arendt‐Nielsen L, Morlion B, Perrot S, Dahan A, Dickenson A, Kress HG, Wells C, Bouhassira D, Mohr Drewes A. Assessment and manifestation of central sensitisation across different chronic pain conditions. European Journal of Pain. 2018 Feb;22(2):216-41.
- Lichaamsbeweging bij de preventie en de behandeling van ziektes - EUPAP FYSS-short.
Autre source